lundi 2 mai 2011

Cell

J'étais enfermé dans une cellule aux murs blancs, sans fenêtre, avec pour seule issue une porte en fer clouté qui me séparait du monde.
Je n'avais pu manger, ni dormir, ni boire, ni parler à quiconque, depuis tant de temps, que j'avais fini par accepter ma condition. Avec stoïcisme et résignation, je passais le plus clair de mon temps assis en tailleur au centre de ma cellule, et pendant tout ce temps, j'essayais d'apaiser mon esprit, de garder prise avec le peu de réalité qu'il me restait.

Car à rester, seul et enfermé, sans rien d'autre à faire que penser, sans jamais s'arrêter, sans jamais avoir quoi que ce soit pour se changer les idées, la folie devient une compagne aux promesses envoûtantes.
De sa voix enjôleuse, elle me promettait que je serais libre, que je connaîtrais la paix, que tout ce dont j'avais jamais rêvé serait à ma portée. Tout ce qu'elle voulait, en échange, c'était ma raison.
Elle revenait régulièrement, chaque jour plus tentatrice, chaque jour plus séduisante. Elle me montrait des univers, où ma seule limite serait mon esprit, et où je pourrais vivre libre.

Je ne sais pas ce qui m'a fait tenir. Un semblant d'éducation, un reste de raison, quelques repères, je suppose.

Non.
Attendez, ça me revient.
J'ai tenu grâce aux voix. Lorsque je collais mon oreille à la porte, attentif et silencieux, il m'arrivait parfois d'entendre au loin des voix qui parlaient entre elles. Souvent, elles parlaient de moi, de ma prison, à voix basse, vaguement triste. Il arrivait qu'elle me parlent, me racontent des histoires, mais alors, j'avais beau répondre, hurler, crier, personne n'entendait jamais ma réponse..

Savoir qu'au dehors, quelqu'un savait que j'existe m'empêchait d'embrasser pour de bon la folie. Sans rien savoir du temps qui passe, sans savoir si des jours, des mois et des années s'écoulaient, j'attendais.

Un jour vint mon jugement.

L'une des voix dit:

- On le débranche. Il est foutu.
- On compte jusqu'à trois. 
Voilà. A trois, j'allais mourir. C'était aussi simple que cela. Je regardai autour de moi. J'allais crever dans cette cellule, sans pouvoir rien faire.
- Un.

Je me jetai contre la porte de métal, rageant de frustration, et m'acharnai en hurlant et en tambourinant contre le battant. Il fallait sortir, et j'allais mourir ici si je ne faisais rien.
- Deux.

Mes hurlements reprirent de plus belle, tandis que j'essayais d'enfoncer la porte. Celle-ci ne bougea pas.
 - Et trois.
 
J'eus l'impression de tomber du haut d'une falaise. Derrière moi, la cellule s'enfonça dans des ténèbres, qui engloutissaient mon univers, et qui bientôt allaient me dévorer. Je crus renoncer.

Une idée me vint, si absurde qu'elle me semblait soufflée par ma folie elle-même. Je me mis à courir. Derrière moi, les ténèbres cherchaient à me happer, gagnant à chaque seconde un peu plus de terrain. Cette fois, je ne courais pas la porte, mais droit dans le mur, crispai mes épaules, me préparant à l'impact.

Le mur éclata en des milliers de fragments, et derrière le mur, un océan de lumière. Les ténèbres s'évanouirent, loin derrière moi.

La lumière s'atténua peu à peu, et révéla des formes floues devant moi, que je pus distinguer au bout de quelques secondes. Je reconnus le faux plafond d'un hôpital, qui faisait office de firmament, et, en guise d'étoiles, des néons blafards qui étoilaient la pièce.

Je pris une inspiration, m'assis sur mon lit, regardai le monde autour de moi avec un regard émerveillé.

Comme un patient qui s'éveille après trois mois de coma. 

*
*   *
Le dernier texte date de plus d'un mois. Putain. A mon tour de sortir du coma. Le temps d'un texte. Je croule sous les travaux d'écriture en ce moment, je n'ai même pas participé au concours organisé par mon ami HDB. Bref, ce blog prend racine.
Et Désolé, par avance, mais ça ne va pas aller en s'arrangeant. J'ai des partiels, des textes, puis je pars à l'étranger pendant un mois, puis en vacances. Donc dans le meilleur des cas, je ne reprendrai pas de rythme de travail régulier avant septembre. Je continuerai à poster occasionnellement, mais ne vous attendez pas à un texte pas semaine. Je ne peux simplement pas.

On se reverra en des temps meilleurs.

lundi 21 mars 2011

Une Nuit avec les Ombres

 Je vous mets en garde. Ce n’est pas votre texte habituel. C’est autre chose. C’est une réalité, racontée dans tout ce qu’elle peut avoir de crue ou de violente, sans concessions.

Je ne me souviens pas de tout.

Les tenants et les aboutissants de cette nuit d’horreur sont restés dans la brume, et c’est avec les parcelles ébréchées d’une mémoire inaboutie que je tente, tant bien que mal, de reconstituer mon tableau.

Ce dont je me souviens, en revanche, est resté gravé dans ma mémoire à tout jamais.

Je me souviens d’une nuit noire. Une nuit surnaturelle, sans lune, sans étoiles, sans lumière, sans vie.

Je me souviens de l’urgence. Une urgence incontrôlable, inexpliquée. Chacun de mes geste étaient, je me souviens, emprunts d’une nécessité absolue d’agir, sans quoi les conséquences seraient terribles.

Je me souviens d’avoir regardé à l’horizon, maintes fois. Je me souviens d’y avoir cherché, dans cette nuit sans espoir, les premières lueurs de l’aurore.
Je me souviens de les avoir cherchées, mais de ne jamais les avoir vues.

C’est un moment tragique que j’ai vécu, et depuis ce soir, chaque fois que je vois le soleil se coucher, je me demande si ce n’est pas le dernier.
Je ne déguiserai pas les atrocités que j’ai commises ce soir là, et si je dois passer pour un monstre, qu’il en soit ainsi.

Voilà pour le décor.

Je regardai l’horizon, toujours obstinément noir. Pour une raison que je ne m’expliquais pas, cela me rassurait.
Je tenais mon épée à la main, déjà ensanglantée, d’avoir dû frayer mon chemin dans le sang, celui d’un garde, à l’entrée de la colonie, qui avait cru bon de s’opposer à moi.

Je suis entré dans la colonie en promettant que mes intentions étaient bonnes. Il en était venu aux mains, m’avait fait perdre mon temps. Et mon temps était précieux. J’avais tiré ma lame, tranché sa gorge, puis passé à autre chose.
Ne croyez pas que tuer un innocent qui ne faisait que son devoir m’aie laissé indifférent. Mais l’urgence, toujours cette nécessité absolue m’avait fait agir, au plus vite, au plus simple sans perdre de temps. Quel qu’en soit le prix.

            Sa mort à lui, au moins, avait été rapide et sans douleur. Dans ces jours de chaos, dans la confusion de ces jours sans étoile, je m’étais découvert un nouveau pouvoir. Des éclairs jaillissant de mes mains, obéissant à ma seule volonté. Un pouvoir que j’avais assumé comme les autres, sans y faire plus attention. Dans le chaos qui régnait dans le monde, les catastrophes, les batailles entre des civils affamés, j’avais cessé de prêter attention à ce qui m’arrivait. Je n’étais plus à une bizarrerie près.

            Je cherchais, je crois, un médaillon. Je ne sais pas pourquoi cet objet revêtait une importance aussi primordiale, ni même ce que j’en ferais une fois en ma possession.
Mais cela n’a plus beaucoup d’importance.
On m’avait indiqué qu’il avait été enterré avec le corps d’une femme morte quelques années plus tôt, et que pour la trouver, je devrais m’adresser à quelqu’un de sa famille.

J’avais trouvé Yan, en train de parler avec des amis. Yan était jeune quand il avait perdu sa mère, et avait aujourd’hui guère plus de huit ans. Comme ses amis, il aborait une expression de sérieux et de maturité qui faisait peine à voir sur un enfant de son âge.
-          Yan !
Il tourna la tête vers moi, me reconnut. Ne me demandez pas, je ne sais pas comment. Il savait qui j’étais, et ce que je faisais ici.

-          Je sais ce que tu cherches. Mais il faudra te battre pour l’avoir. Je veux un duel.
Il sortit un couteau, qu’il pointa sur moi avec résolution, sans un mot de plus. Autour de nous, les autres nous regardaient, en rond, sans rien dire.
Nous nous regardâmes l'espace d'un instant. Je ne comprenais que trop bien l'attitude du gamin. Sa mère était enterrée là à quelques pas, et je savais que son geste n'était que l'expression d'un vague espoir de conserver à sa génitrice un semblant de dignité. Quel âge avait-il, au juste? Huit ans? Que savait-il des idées d'honneur, de survie, de dignité, de danger?

J'eus un regard vers l'horizon. Les ténèbres persistaient, j'avais encore une chance, mais pour autant, je n'avais pas le temps de me battre à la loyale, ni même d'argumenter.
Il ne m'en fallut guère pour dégainer une lame. A peine plus pour me glisser derrière lui, et poser la lame contre sa gorge. La résistance de Yan était risible.
-          Alors? Où est-elle?
- Ce n'est pas un duel! Respecte les...
Je l'interrompis en plaquant ma main sur sa bouche.
-          Tais toi. Tu ne sais pas ce que tu fais, ce que nous risquons tous. Par sa faute.
-          Je m'en fous! Je veux mon duel!

Je levai ma main libre, et serrai le poing. Une décharge d'énergie traversa mon corps et se déversa dans la terre. Des éclairs surgirent du sol, et saisirent les spectateurs, qui se roulèrent au sol en se tordant de douleur.

            Je crois qu'à ce moment-là, une larme a glissé de ma joue. Ou peut être que non, peut-être qu'à ce moment, je n'avais déjà plus rien d'humain, et que je pouvais torturer des innocents sans ressentir la moindre amertume.
-          Le voilà, ton duel.
L'un d'entre eux sombra dans l'inconscience.

Yan renonça enfin, et sans un mot, me désigna une tombe non loin, sur laquelle étaient gravés des mots qui m'étaient familiers. Je m'en approchai, ignorant les insultes du môme qui cherchait sans succès à provoquer ma colère. J'eus beau plisser les yeux, me concentrer, les lettres m'échappaient.

Je posai la main au sol et écoutai le grondement sourd de la terre sous ma paume. Je sentis, faiblement, six pieds sous mes pas, une pulsation très faible, comme les battements de coeur d'un mourant. J'étais tout près du but, et il ne me faudrait qu'un instant pour...

Alerté par un sens que je ne me connaissais pas, je levai la tête. Devant moi, une intense lumière rouge.
-          Ca commence déjà, dit le môme.
Je reconnus peu à peu, dans la lumière, une colonne de flammes, surmontée d'un dôme rougeoyant, très loin à l'horizon. J'abandonnai le médaillon. Il était trop tard, il n'y avait plus rien à faire.
-          C'est où, selon toi?
-          Paris, je suppose. Ne t'inquiète pas, la prochaine est pour nous.

Je sortis mon téléphone, voulus composer un numéro. Appeler ma famille, mes amis, leur dire toutes ces choses que j'avais négligées de leur dire quand il en était encore temps. Le téléphone sonna une première fois. Je regardai le lent développement de l'explosion au loin, perdis mon regard dans le ballet des flammes.

La tonalité du téléphone retentit une seconde fois dans le vide.

Mon intuition guida mon regard vers l’ouest, vers l’océan. La mer demeurait, docile et immobile, ce qui, plus que tout autre chose, m’indiquait que quelque chose allait se produire.

L’eau sembla d’abord se soulever de quelques pas, puis retomba. Il y eut un instant de calme.
Puis une forme s’éleva dans les airs, reconnaissable entre mille. Un missile M51 à tête nucléaire, lancée d'un sous-marin, dont la traînée lumineuse s’élevait, mètre après mètre, vers le firmament. A l’aide de mes jumelles, je voyais le monstre très distinctement. Je pouvais distinguer les détails de la carlingue, le numéro et le type de l’engin, malgré la nuit, malgré les ombres qui nous entouraient.

L’engin n’eut guère le temps de s’élever, et se désintégra en plein vol.

Me voilà à l’instant fatidique, le point de basculement de ce texte.
J’ai beaucoup redouté cette scène au moment de l’écrire, et j’aurais voulu pouvoir vous décrire, dans ses moindre détails, toute la beauté de cette fin du monde. J’aurais voulu vous décrire l’explosion du missile, étage par étage, le hurlement du métal de la carlingue déchiré par la pression interne. J’aurais voulu vous montrer cette colonne de lumière, le geyser d’eau en formation au moment où le souffle atteint le sol.
J’aurais voulu dire comme il était beau, ce spectacle, à la jonction des quatre éléments, eau, terre, air, feu, tous les quatre mêlés dans un maelström innommable, à quel point le chaos peut être salvateur, quand on n’attend plus rien de l’ordre.

Au centre de l’enfer originel, on put distinguer une lumière, intense, pâle et blanche, qui croissait sans sembler jamais s’arrêter, qui m’enveloppa peu à peu.

Puis le silence. Puis l'ordre, à nouveau.

dimanche 13 mars 2011

...

Il parait qu'il faut que j'écrive plus d'histoires humoristiques.

...et merde.

Quelqu'un a une idée de nouvelle un peu déconnante? (passque je sais pas vous, mais les derniers posts sont pas joyeux-joyeux, hein.)

mardi 8 mars 2011

La Cité Mouvante

Je passai ma manche sur mon front, afin d’essuyer la sueur et les traces de suie qui s’y accumulaient, puis ajoutai à contrecœur une pelletée de charbon dans la chaudière afin de nourrir le feu mourant qui brûlait devant moi. Je jetai un coup d’œil au tas de charbon qui s’amenuisait à quelques pas.
Epuisé, je m’assis contre le mur, accoudé à un tuyau qui amenait de l’eau froide dans le four, seule source de fraîcheur dans cet enfer de vapeur et de charbon. J’avais peine à comprendre pourquoi la plupart des gens enviaient mon travail. Contrairement aux autres, il était certes à l’abri de la neige et des intempéries, mais personne n’imaginait que la chaleur pouvait être aussi pénible à supporter que le froid.
Et dans la Cité Mouvante, le froid, c’était la mort. L’immense chaudière centrale mettait en route les immenses chenilles qui portaient la Cité, elle pourvoyait toute la population en chaleur, en eau chaude. La Fournaise nous maintenait tous en vie.
Pendant les mois les plus cléments de l’été, nous faisions des provisions en bois, en charbon, afin de se préparer à l’hiver. Quand les grands froids arrivaient, il était indispensable d’en rassembler suffisamment pour tenir jusqu’à l’arrivée du printemps. Pendant l’hiver interminable, il neigeait sans discontinuer pendant neuf mois. Les forêts, les mines étaient enterrées sous des tonnes de neige, et ne réapparaissaient qu’à la fonte des neiges. Pour survivre, le village se déplaçait sans cesse, de point de chasse en point de chasse, afin de toujours trouver de quoi subsister dans notre empire polaire.
S’arrêter aurait signé notre arrêt de mort à tous, car il ne fallait que quelques jours pour que la tempête de neige enlise le village ambulant, et sans bouger, nos ressources en nourriture s’amenuisaient rapidement. Notre survie était donc précaire. Nous vivions dans un équilibre fragile, et il suffisait de peu de chose pour bousculer nos chances de survie.

Je ne sais pas exactement ce qui s’est passé cet hiver-là, et sans doute devrais-je accuser un concours de circonstances fâcheuses. Les grands froids étaient venus plus tôt que prévu, la collecte de bois avait été moins bonne, des accidents, survenus pendant l’hiver, avaient nécessité de puiser dans les stocks de bois pour faire les réparations.
Le mois de mars approchait, et les stocks s’amenuisaient inexorablement. La nuit interminable, la neige et le froid, en revanche, semblaient ne jamais vouloir s’arrêter. Je m’en ouvris au conseil, qui promit d’y réfléchir et de trouver une solution, ce qui me fit perdre patience. La solution, je la connaissais, mais le conseil qui dirigeait le village refusait formellement de l’appliquer.

En de rares moments, la chape nuageuse qui recouvrait notre territoire cessait légèrement, offrant à la ville mouvante un bref instant de répit pendant les neuf mois de tempête. On pouvait alors voir les Ruines, derniers vestiges de la civilisation de nos ancêtres, des immeubles abandonnés et des tours d’acier noir qui se détachaient à l’horizon. Les lieux étaient vides depuis des siècles, sans que personne ne sache réellement pourquoi. Les ruines faisaient l’objet de nombreuses histoires plus fantaisistes les une que les autres. Les uns racontaient qu’elles abritaient un démon des glaces, les autres affirmaient que la pollution avaient rendu l’air irrespirable. De l’avis général, ceux qui s’y aventuraient n’en revenaient jamais.
Ces histoires, j’y croyais, dans une certaine mesure, car je me doutais bien qu’une ville entière ne pouvait pas avoir été abandonnée sans une bonne raison. Mais ce dont j’étais sûr, c’était que si une expédition n’était pas organisée, nous mourrions tous de froid et de faim avant la fin de l’hiver.

Devant mon insistance, le conseil céda. Je résolus de partir seul, tiré par un traîneau. Une polaire me protègerait du froid, un fusil me protègerait des ours, et un masque à gaz me protègerait contre… Dieu savait quoi. Dans le sas qui séparait le village du monde extérieur, je flattai l’encolure des chiens qui m‘accompagneraient dans ma sortie.
Lorsque la porte s’ouvrit dans un bruit de vapeur, je sortis, réajustant mon col afin de mieux me protéger contre la tempête qui me mordait les joues. Nous marchâmes dans l’immensité polaire pendant des heures. Quand je me retournais, je voyais mes traces de pas que la tempête recouvrait lentement, et, plus loin, beaucoup plus loin, la Cité qui s’éloignait lentement, et qui se fondait peu à peu dans l’horizon.
Les ruines n’étaient guère loin, et il ne me fallut guère de temps pour en atteindre les bords. Les places et les rues avaient disparu sous des dizaines de pieds de neige depuis bien longtemps, et on ne voyait de cette ville abandonnée que d’interminables immeubles qui surgissaient du sol. Et créaient un univers de noir et de blanc, à peine nuancé, ici et là, par le logo coloré d’une compagnie pétrolière depuis longtemps tombé dans l’oubli.

Je guidai mon traîneau avec hésitation, sans trop savoir si je devais me mettre en quête de ressources immédiatement ou s’il était préférable de chercher un abri pour se reposer, quand un des chiens s’agita, bientôt imité par ses congénères Ils se mirent à grogner en direction d’un angle de rue, et c’est alors que je distinguai une forme sombre qui se tenait tapie dans un angle, et qui semblait guetter le moment propice pour me tomber dessus. Je l’abattis d’un tir de fusil à l’instant même où elle bondissait dans ma direction. Dans un jappement de douleur, la créature s’effondra sur le sol et ne bougea plus, et je m’approchai pour l’examiner avec attention. C’était une sorte de gros loup, dont la fourrure noire était épaisse et douce. De son flanc coulait une tache de sang qui imprégnait la neige.
Pris d’une pitié que je ne m’expliquais pas, je laissai là l’animal et repris ma route.

Je ne trouvai pas ce que je cherchais avant bien plus tard le lendemain. C’était une immense citerne, qui abritait un liquide noir, visqueux et nauséabond.
J’en prélevai tout d’abord une petite quantité. Au contact de la flamme de mon briquet, le liquide s’enflamma en un instant et se consuma pendant de longues minutes. Exactement ce que je cherchais. Je passai donc la journée à remplir les tonneaux que j’avais amenés sur le traîneau, puis, une fois ma cargaison faite, je repris ma route sans plus attendre.
Je sortis des ruines, et retournai dans ma Fournaise le cœur léger, sans autre incident pour interrompre mon voyage.
Pendant le voyage, je réfléchissais aux moyens d’exploiter cette ressource. Jeter l’huile directement sur le feu s’avéra être une mauvaise idée, car le liquide explosait au lieu de se consumer. La solution s’avéra d’une simplicité enfantine : Imbibé de liquide, le charbon qu’il me restait brûlait pendant bien plus longtemps, bien plus fort.
Une fois rentré, je jetai quelques morceaux de mon mélange dans le feu afin d’examiner le résultat. Le feu vira soudain au bleu, puis au vert, et dégagea une fumée noire, si âpre et intense que je me sentis défaillir. Je sortis en courant de la pièce, refermai la porte derrière moi en toussant jusqu’à en cracher mes poumons.
Je bandai un mouchoir autour de mon visage et retournai dans la pièce. Je n’y voyais rien, la fumée me piquait les yeux et m’obligea à les garder fermés. Je titubai au milieu de la pièce, manquai de trébucher contre le tas de charbon, puis atteignis le mur d’en face. Mes mains trouvèrent un levier, que j’actionnai en priant de toutes mes forces pour que ce soit le bon.

Dans le plafond, des conduits d’évacuation s’ouvrirent, aspirant en quelques minutes tout ce que la pièce contenait de vapeurs toxiques. Lorsque j’ouvris enfin les yeux, la fumée était partie. Elle suivrait les conduits d’aération, sortirait par les cheminées et s’évanouirait dans la nature, bien loin de nous.

Nous étions sauvés.


*
*     *

J'ai conscience d'être resté silencieux pendant un peu plus de temps que je ne l'aurais voulu, et, autant que possible, j'espère que personne ne m'en voudra. Je croule sous des projets, tous  plus importants les uns que les autres, et qui vampirisent l'essentiel de mon temps.
Quand, il y a quelques semaines, il m'a fallu revoir l'ordre de mes priorités, j'ai été obligé de mettre ce blog en bas de la liste. Ce qui me désole.

C'est une banale histoire de temps, comme toujours.




Du coup, pour me rattraper, je vous propose d'aller faire un tour du côté du blog-tout-frais-tout-neuf de mon ami HDB! Il organise un concours d'écriture (auquel je voulais participer, et puis j'ai pas eu le temps.)

En attendant, soyez dignes!

vendredi 11 février 2011

Encore un Jour Ordinaire...


J’enfile ma veste rembourrée en fourrure synthétique, mes lunettes de pilote, puis je sors de chez moi. Le froid me dévore les doigts, et à ce moment, je regrette d’avoir perdu mes gants. Tant pis. Les mains dans les poches, je marche quelques minutes dans la rue déserte. Au détour d’un immeuble à moitié effondré, le soleil matinal vient caresser mon visage, réchauffant mon visage engourdi et me faisant plisser les yeux.

            Pendant la nuit, un arbre géant a poussé au milieu de ma rue, et ses grosses racines ont percé le bitume et lézardé le trottoir. Son feuillage épais dépasse déjà en hauteur les immeubles autour de chez moi, et une nuée d’oiseaux semble y avoir élu domicile. Au loin, j’entends le mélange confus des bruits de la cité qui s’éveille, de quelques véhicules encore en état de marche qui passent au loin et des animaux sauvages qui se mettent en chasse.
            Je contourne la rue bloquée et lui préfère une rue parallèle, puis traverse un parc minuscule, dans un état parfait, aux rosiers soigneusement taillés, aux haies coupées et aux chemins entretenus, et ce petit coin en ordre me semble d’autant plus singulier que partout ailleurs, la ville est à l’abandon, envahie par les animaux, les plantes et la rouille.
Lorsque je sors du jardin, je vois, entre deux immeubles, la Seine qui coule, imperturbable, sous des ponts qui ne la traversent plus depuis longtemps.

            Même l’hiver, même le matin, même cent jours après la fin du monde, Paris sera toujours Paris.

Slalomant entre les plaques de neige, les épaves de voitures rouillées, je parviens devant une grande porte de garage, dont je soulève le métal rouillé qui grince sous l’effort.
Enfin, le métal bascule, et révèle mon vaisseau qui dort sagement en m’attendant.
Je m’approche, pose doucement ma main sur le capot. Les phares s’allument en me reconnaissant, et les moteurs émettent un doux vrombissement. Enfin, la grosse carcasse de métal blanc se soulève et avance vers l’extérieur. Je me recule pour la laisser passer, me glisse dans l’habitacle. Mes mains effleurent le tableau de bord d’un noir lisse et uniforme, qui s’allume sans un bruit et laisse apparaître des dizaines de voyants et d’indicateurs. Un geste, quelques lignes de code, et l’appareil sort du garage et s’élève lentement dans les airs, sans que j’aie plus à m’en préoccuper.

            A la vue du vaisseau qui poursuit son ascension avec majesté, quelques corbeaux jaloux battent les ailes, et battent des ailes à mon intention, sans pour autant ose quitter leurs nids, confortablement installés dans les rebords de fenêtres, dans les replis du lierre qui s’installe dans les immeubles, les façades et les maisons abandonnées, comme un roi chassé de son trône, qui reviendrait après une longue absence.

Je quitte mon fauteuil de pilote et me rends sur le petit comptoir derrière moi, où j’allume le feu, puis ouvre un placard à la recherche d’un reste de café. C’est le moment que choisit un chat, pas bien vieux et visiblement affamé, pour bondir hors du placard qu’il essayait visiblement de piller.
J’attrape l’animal par le cou et le dépose sur mon fauteuil, depuis lequel il me regarde avec méfiance m’affairer dans la minuscule cuisine du vaisseau volant. Je reviens quelques minutes plus tard, une gamelle de viande chaude dans une main et une tasse de café brûlant dans l’autre.
Lorsque je dépose la nourriture à ses pieds, il renifle l’offrande, puis la faim l’emporte sur la suspicion, et il descend de son piédestal et commence à dévorer son repas.

            C’est avec peine que j’actionne le levier qui ouvre la porte donnant sur le pont extérieur, et vent glacial s’engouffre dans la cabine. Je sors quand même des larmes gelées dans les yeux, et m’assois sur le rebord du pont, les pieds pendant dans le vide, mon café à la main. Le chat a fini de manger et, tandis qu’il vient se lover contre moi, j’admire la lente course d’un nouveau matin d’après la fin du monde.

[j'ai eu envie d'un texte tranquille, qui ne dit rien tout à fait, qui se contente d'énoncer des aspirations et un état d'esprit que je recherche. Toute ressemblance avec des oeuvres existantes ou ayant existé (une note de Boulet, par exemple), est totalement pas fortuite.]

mardi 1 février 2011

Divagations Souterraines

Il y a des idées qui prennent comme des révélations, qui donnent envie d’écrire, de raconter quelque chose de fort et personnel. Après une journée épuisante, j’écoute de la musique, adossé à la barre en métal du métro, somnolant un peu, et laisse mes pensées divaguer sans frein.
C’est un de mes moments préférés de la journée. Un temps à part, une demi-heure hors de tout, du rythme de vie que je m’impose, où je n’ai rien d’autre à faire que d’errer, sans but, dans le dédale de mes propres pensées, et où la fatigue me mène à abandonner, pendant un moment, la norme des pensées construites. C’est le moment où je cesse de penser, et où je commence à divaguer.

            A ce moment, je cesse d’être moi. La logique cesse d’avoir cours dans mes pensées. Mon esprit devient un dédale ténébreux que je peux suivre à loisir, éclairé, à chaque carrefour, par une idée, un sentiment, une image. Je peux choisir de changer de direction, de mener mon errance ailleurs, mais dans ces tunnels là, nul ne peut prédire où je ressortirai.

            Une fois quittée la rame de métro, la vie reprendra son cours. Je rentrerai chez moi, et mes pensées reprendront le chemin qu’elles n’auraient jamais dû quitter. Je sais, dans le métro, que bientôt il faudra assigner à nouveau mon cerveau à fonctionner normalement, par sujet, verbe et complément, par pensées construites et intelligibles, et pas par les bribes d’images et de pensées à peine formulées à laquelle mes errances me mènent.

Toutefois, de temps à autre, j’ai une idée. Quelque chose de réellement bien, qui ferait une belle nouvelle, voire un roman entier. C’est une souffrance sans nom que d’avoir une idée, et de devoir se résoudre à la mettre de côté en se disant que non, décidément, on n’a pas le temps. En général, je me promets de la garder dans un coin de ma tête, pour le jour où j'aurai l'occasion de mener cette idée à son terme, tout en sachant que ça n'arrivera pas.

Des idées, j’en ai tous les jours, par milliers.

Le temps, en revanche, me fait cruellement défaut.

dimanche 23 janvier 2011

Ghostwriters

J'ai créé une page spécialement dédiée à l'exercice, vous pouvez le trouver juste sous la bannière! Les autres participations y sont toutes rassemblées (en théorie, du moins), donc c'est là que ça se passe.


Wanderers (c'est le titre)


Dehors était la lumière.
            Il m'est arrivé, aux premières heures de mon existence, de vouloir repousser les limites de mon royaume, de me rendre dehors, m'approcher des tours, des machines volantes que je distinguais au loin. Mais à chaque pas que je faisais à l'extérieur, je perdais de ma substance, je disparaissais dans la lumière, et pas à pas, ma silhouette informe et évanescente se faisait moins dense. Juste avant de disparaître complètement, je faisais demi-tour et retournais dans mes ténèbres, à l'abri, auprès des miens. Je me contentais de regarder le monde à l'abri, derrière les fenêtres de mon royaume en ruines.

            On nous a affublé de bien des noms. Esprits des Songes, Anges, fantômes, Dévoreurs d'Âmes... Nous étions les Wanderers, les esprits qui hantent les royaumes oubliés, se repaissant des souvenirs des rares voyageurs qui osent s'aventurer jusque dans notre domaine.

            De temps à autre, un homme passait, pendant quelques heures. Il visitait le salon, quelques chambres, faisait un tour dans l'immense jardin. Il se promenait entre les baies vitrées, visitait la chapelle, le théâtre, la cuisine, toutes les pièces qui composaient notre grande demeure. Une partie de la maison, les chambres, le salon, avaient brûlé, des années plus tôt, et étaient laissées à l’abandon.
Le plus souvent, nous restions cachés, derrière les piliers, les fenêtres, et nous errions dans l'esprit de nos visiteurs. Tandis que les visiteurs erraient dans notre royaume, nous sentions nos corps changer, des souvenirs des êtres qu'ils avaient connus affluaient dans nos êtres. L'espace d'un instant, nous devenions d'autres personnes, et nous vivions les vies des autres.
Cela ne durait pas. A chaque fois, nos visiteurs s'en allaient, et nous devions abandonner ces vies, oublier ces souvenirs qui n'étaient pas les nôtres, et attendre avec mélancolie le passage d'un nouveau visiteur.

            Et puis un jour il est arrivé.
Nous sentîmes, en le voyant passer la grille de fer rouillé, qu'il n'était pas comme les autres. Il ignora la grande porte, grimpa sur une gouttière, passa sous une ouverture trop petite pour lui, comme conçue pour un enfant et pas pour cet homme vieillissant, fatigué, qui marchait sur les tuiles croulantes sans la moindre hésitation. Il se glissa dans une petite fenêtre, atterrit dans le théâtre. Sous ses pas, les planches moisies craquèrent. Quelques esprits, cachés sous les lattes du parquet, prirent peur et détalèrent dans un bruit de souris effrayées.

            Je sentis une explosion des souvenirs et de sentiments  éclore en moi, des odeurs de feu de bois, des fragrances entêtantes. Un champ couvert d’herbes folles, une maison sous la neige, des temps heureux, passés ensemble. Je reconnus dans l’homme devant moi Julien, l’homme que j’aimais. Un mélange de douleur et de joie, des enfants, des disputes, un baiser. Tout cela à la fois.

Un prénom : Elena.
Le mien.

D’autres souvenirs, plus récents. De la douleur. De la panique, une maison qui brûle, un homme qui se tenait, impuissant, devant les ruines d’une demeure qui s’effondrait peu à peu. Dans ses bras, un corps brûlé et ensanglanté, que l’on reconnaît à peine, qui m’est pourtant familier. Lorsque je reconnus son visage, un cri de douleur m’échappa. Le corps était celui d’Elena.
Le mien.

Julien m’entendit, releva la tête et regarda dans ma direction.
Il ne vit rien. J’étais déjà cachée, à l’abri dans les coulisses du petit théâtre, et j’eus le loisir d’examiner cet homme à mon gré, comprenant enfin la nature de sa douleur. L’homme saisit la corde qu’il avait amenée, lovée autour de son épaule, et la jeta à une poutre au dessus-de lui, amena un tabouret et confectionna un nœud que je reconnus vite.

            Un frisson me parcourut l’échine. Julien allait se pendre. J’allais intervenir, quand les lumières faiblardes qui éclairaient la pièce, des lueurs de théâtre, à peine plus fortes que quelques bougies, s’éteignirent, laissant pour seul éclairage dans la pièce la colonne de lumière qui tombait de la lucarne qu’avait emprunté Julien pour venir, rendue visible, matérielle, par la poussière soulevée, comme la poursuite d’une scène de théâtre, éclairant les planches, à quelques pas à peine, devant Julien, qui tenait toujours sa corde d’un air surpris.
Les notes d’un piano retentirent au loin, un peu étouffées, indistinctes. Jouées avec automatisme, sans âme, elles me rappelaient un moment d’une existence que je n’avais pas connue, mais que je devinais à travers les souvenirs que j’avais volés à cet homme.
            Je vis une larme couler sur la joue de Julien et s’écraser au sol.
Le moment d’hésitation nostalgique de cet homme, debout sur un tabouret, une corde à la main et une larme à l’œil, sembla durer des siècles.

            Puis une première silhouette s’avança dans la colonne de lumière, comme surgie de coulisses invisibles. Une forme aux cheveux blonds, dont le nom m’apparut alors qu’elle faisait un pas dans la lumière.
-         Faut-il que la vie t’ait marché dessus, pour que tu en arrives là.
-         Louise murmura Julien. Tu n’es pas…
Le mot « réelle » ne vint pas. Julien fit un pas en avant, approcha sa main et effleura la joue de Louise.
-         Vous me manquez, toi et Marc.
-         Je sais.
-         Je suis désolé que vous ayez dû payer pour m-oi.
Louise ne dit rien, regardant la bague de fiançailles que son fiancé, Marc, lui avait offerte quinze jours avant le drame.
-         Ça aurait été un beau mariage, soupira-t-elle.
Il regarda autour de lui, comme s’il reprenait conscience du décor autour de lui, des murs en
-         Suis-je en train de devenir fou ?
-         Non, dit-elle. Pas encore.
-         Alors qui es-tu ?
-         Je

Elle fit un pas hors du cercle et disparut lentement. Une nouvelle personne apparut ensuite, et Julien ne sembla pas marquer la moindre surprise à sa vue. Je le connaissais, lui aussi.
-         Tybalt.
-         Bonjour, Julien.
Tybalt avait ce sourire en coin qui me mettait toujours mal à l’aise. Une expression indéchiffrable, dont je n’avais jamais su si elle était une promesse de mort ou un sourire réconfortant.
-         Je pensais que tu essaierais de me tuer encore une fois en me voyant.
-         J’ai eu le temps d’y réfléchir. J’ai passé quatre ans en prison, Tybalt, quatre longues années, pendant lesquelles je me suis demandé si j’aurais dû agir autrement.
-         Et ?
-         Oui, évidemment. Tu te souviens, quand tu as brûlé ma maison, avec Elena, Louise, Marc et Pauline, à l’intérieur ?
-         Oui. Cela n’a servi à rien, tu n’étais pas là ce jour-là. Je voulais détruire ton bonheur, Julien, par ce que je trouvais ta vie avec Elena trop belle, chaque jour qui passait, ton succès me rendait amer de jalousie, alors j’ai brûlé ta maison.
-         Qu’as-tu ressenti à ce moment-là ? De la joie ?
Tybalt ferma ses yeux verts, tentant de reprendre pied avec des souvenirs qu’ils n’avait jamais vécus. Nos souvenirs n’étaient pas véritablement ceux des gens dont nous prenions l’apparence, mais la représentation, telle qu’elle existait dans les souvenirs de nos visiteurs, et pour cette raison, Tybalt se heurtait à un rideau infranchissable.
-         Non, je ne crois pas, dit-t-il enfin.

Il y eut un silence, une infime fraction d’éternité, pendant lesquels ces deux anciens ennemis se regardèrent avec intensité. Puis une silhouette apparut dans les coulisses, une petite fille en chemise de nuit, à l’air apeuré. C’était Pauline, la fille que j’avais eue e Le décor autour se brouilla, et l’espace d’un instant, le théâtre autour de nous disparut.

Trois personnes se tenaient dans un jardin, en pleine nuit. Le sol était devenu de la terre, et autour de nous, le gris et le blanc du petit théâtre étaient devenus gris et rouge. Derrière Julien, la lune rayonnait, et lui donnaient un air sauvage.
Face à lui, le dos tourné à la maison en flammes, Tybalt tenait Pauline dans ses bras. Il paraissait frêle et fragile, et se tenait courbé, fatigué et usé par sa bataille contre les flammes. Il posa la fille dans les bras de Julien, et le père et la fille s’enlacèrent.

Tybalt eut un air de pitié, se détourna lentement, et partit à pas lents.
-         On se reverra.
C’était une promesse de mort.

Le décor se brouilla à nouveau, et le petit théâtre revint en place.
-         Je suis désolé, dit Tybalt. Je n’ai pas voulu tuer Elena. Tout ce que je voulais, c’était écorner votre beau bonheur, votre vie parfaite. C’est pour cela que j’ai brûlé votre maison. Mais tes amis, ta femme et ta fille y dormaient, et je m’en suis rendu compte trop tard. Je suis rentré dans ta maison en flammes, et j’ai su que j’avais peu de temps. Pas assez pour tous les sauver, en tout cas.
-         Je sais tout ça. Pourquoi me le dis-tu ?
-         Par ce que j’ai sacrifié ma vie pour sauver ta fille, rattraper un tout petit peu le crime que je venais de commettre. Alors que je courais à l’étage, dans la chambre de Pauline, j’ai eu tout le temps de penser à ce que tu ferais quand tu verrais ce que j’ai fait. Je savais que la justice ne te suffirait pas, et que tu voudrais ta revanche.
-         Et tu l’as sauvée, plutôt que de courir pour ta propre peau.
-         Oui.
La voix de Tybalt résonna alors qu’il  s’éloignait, laissant la jeune Pauline seule sur scène. Il eut un dernier regard, posa la main sur un cordage et abaissa le rideau de la scène, qui glissa sans un bruit sur le sol.

Julien descendit du tabouret, comme sortant un pied de la tombe, puis l’autre.
-         Je serai avec toi, ma belle. Pour toujours.
Il serra Pauline dans ses bras.       



Je suis un peu emmerdé par ce texte, j'y ai passé vraiment beaucoup de temps, j'aimais bien l'idée de départ, et puis j'ai été gêné par mes propres limites en matière d'écriture. Je considère humblement avoir fait tout ce que je pouvais décemment faire dans mon état. Je reviendrai peut être dessus, mais je ne crois pas.