Il y a cinq ou six ans, mon professeur de français m'a offert un livre.
Le Neveu de Rameau, de Diderot.
Je devais être en première.
Il me l'avait confié avec un genre de lueur dans les yeux, comme
convaincu que j'y trouverais quelque chose d'unique, de spécial. Je me
trompe peut-être, mais aujourd'hui encore, quand je le vois me tendre
l'objet, je vois le livre, et son regard.
Ce livre, je ne l'ai jamais lu.
D'abord par flemme. Je l'ai laissé traîner là, sur ma table de chevet,
sur mon bureau, dans ma bibliothèque. Je sais qu'il faudrait que je le
lise, ce foutu bouquin.
Aujourd'hui, il trône sur mon bureau, entre La Vie de Marianne et Opuscules sur l'Histoire. Deux livres étudiés à la fac, que j'ai pris, lus, annotés, relus, reposés, cent fois au cours de l'année.
Entre les deux, Diderot traîne. C'est une édition sans grand intérêt,
probablement publiée quelque part durant les années 70, qui porte
l'odeur du vieux papier, et jauni comme un livre qui se meurt.
Il ne se passe pas une journée sans que mon regard se pose dessus. Comme
si à tout instant, je pouvais décider de le saisir et de le dévorer.
Je n'y touche jamais.
Je sais que le jour où je me résignerai enfin,
je devrai accepter de n'y trouver que les histoires que l'auteur a
écrites, et pas celles que je voudrais y lire.
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